C'est ici à Puylaurens, rue Foulimou, que naquit et vécut Guillaume Lavabre, cordonnier troubadour, qui en octobre 1792 baptisa la toute jeune république du nom de "Marianne", prénom très répandu à l'époque dans ce pays Occitan. Sa chanson "La Garisou de Marianna" (La guérison de Marianne) fait donc date et permet à la ville de revendiquer à juste titre l'appellation de "Berceau occitan de la Marianne républicaine". Retour sur cette fabuleuse histoire !

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Marianne : un mystère long de 200 ans


Cette jeune femme au drôle de chapeau, osant parfois d'audacieux décolletés et toisant les administrés de France avec des airs de belle indifférente, a tourné la tête de bien des historiens. Marianne, l'emblème de la République française, a longtemps laissé planer le doute autour de ses origines. Des hypothèses diverses circulaient : Tenait-elle son nom du modèle ayant posé pour le premier buste ? Ou de sociétés clandestines républicaines du sud de la France pendant le Second Empire ? Etait-ce le prénom de la femme d’un conventionnel ? Frédéric Mistral quant à lui parlait bien d’une horrible chanson qui circulait dans le midi... mais avant 1980, les historiens ne connaissaient pas les véritables origines du nom de Marianne.

C'est Paul Hormière, érudit puylaurentais, qui exhuma la chanson « La garisou de Marianno », écrite par Guillaume LAVABRE, de la Bibliothèque Nationale. Dès 1980, Christian Laux historien tarnais de la langue d’oc, avait émis l’hypothèse que cette chanson fut la première attestation du nom de Marianne pour la République Française. Le Bicentenaire de la Révolution Française en 1989 fut l'occasion d’organiser un colloque à Puylaurens, présidé par l'historien Maurice Agulhon. Celui-ci confirmera que la première mention écrite connue du nom Marianne pour la République provient de cette chanson !

Il aura donc fallu attendre 1989 pour lever définitivement le voile sur les origines de la mystérieuse égérie. Le doute est enfin dissipé : Marianne est née à Puylaurens, en 1792...

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La petite histoire de Marianne et de sa "garisou"


En cette fin du XVIIIe siècle les nouvelles circulent plus vite et mieux par la chanson que par les journaux auxquels beaucoup n’ont pas accès. Un fait d’actualité est mis en musique sur un air connu, bien mémorisé, facile à chanter.

Combien de temps faut-il alors aux nouvelles du front pour parvenir aux sociétés révolutionnaires de Castres, de Puylaurens ? Difficile à dire... Mais Guillaume LAVABRE, un cordonnier de Puylaurens, écrit en Occitan une de ces chansons de circonstance, dans l’enthousiasme de la nouvelle république et des victoires récentes qui soulagent les Français. Il utilise un air connu, celui des petits savoyards, et appelle la nouvelle République "Marianne". Pourquoi ? On ne le sait pas vraiment. Mais en lisant les actes de baptême, de mariage et de sépulture de Puylaurens dans la deuxième partie du XVIIIe siècle, ce prénom est majoritaire chez les femmes du peuple, chez les catholiques bien sûr. Marianne serait donc la femme du peuple. Cette chanson, « La garisou de Marianno », chanson d’actualité dans laquelle Marianne, rendue malade par la monarchie, est guérie grâce à la république, n’avait pas vocation à être connue pendant des décennies ou des siècles. Elle se répandit pourtant rapidemment dans tous le pays le nom de Marianne fut peu à peu associé à la république...

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Le visage de Marianne

La République a donc un nom, et ses origines sont Puylaurentaises. Mais qu'en est-il de son visage ? Difficile de savoir à quel moment précisément on associa le nom de Marianne à l’image symbolique de cette femme au bonnet phrygien qui trouve ses influences dans l'antiquité (le bonnet phrygien coiffait alors les esclaves affranchis).

A la chute du Second-Empire, les sociétés républicaines du sud de la France exhumèrent des bustes de femme représentant la république. Dans les riches régions viticoles du Midi on en érigea des statues monumentales en pied. Mais à cette époque l’opposition république/monarchie est encore vivace et Marianne comme représentante de la République ne fait pas l'unanimité. Il faudra attendre la guerre de 1914/1918, qui dans le malheur soudera la nation, pour que Marianne et son bonnet phrygien, symbole de la France et de la république, soit acceptée par tous les Français !
 
Texte : Ville de Puylaurens, d’après les écrits de Marthe BOYER, professeur d’histoire à Puylaurens et membre du Centre Archéologique Puylaurentais – 2022

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Photo de gauche : La statue de Marianne du bicentenaire est l’œuvre de Roger-Louis Chavanon (1937 2010) : Peintre-graveur-médailleur-sculpteur. Il offrit un buste à la municipalité de Puylaurens pour l’exposition Marianne en 1989.